H - Hommage à trois grands Naturalistes : Buffon, Linné & Darwin
Sous les dénomination en français, Anglais et Latin des animaux que je vous présente sur mes pages, vous trouvez également un nom et une date entre parenthèses. Ce nom correspond au descripteur et la date correspond à l'année de ladite description.
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La zoologie et la botanique semblent être, pour beaucoup, des disciplines poussiéreuses et archaïques.
Pourtant, ce sont ces sciences qui ont permis de formuler la théorie de l’évolution, de poser les bases de la réflexion écologique.
Leur importance est encore plus manifeste aujourd’hui alors que la biodiversité est fortement menacée.
L’année 2007 à marqué le tricentenaire de la naissance de Linné et de Buffon qui ont marqué de façon décisive l’histoire des sciences de la vie.
Ces deux naturalistes du XVIIIe siècle entreprirent de mettre un peu d’ordre dans le foisonnement des espèces vivantes.
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Georges-Louis Leclerc, comte de Buffon, né le 7 septembre 1707 à Montbard (Côte-d'or actuelle) est un naturaliste, mathématicien, biologiste, cosmologiste, philosophe et écrivain français. À la fois académicien des sciences et académicien français. Ses théories ont influencé deux générations de naturalistes, en particulier Jean-Baptiste de Lamarck et Charles Darwin. Digne représentant des Lumières, il a en effet révolutionné les sciences en consacrant plus de 50 années à l'élaboration d'une gigantesque "Histoire naturelle" salué par ses contemporains.
Depuis 1908, Georges-Louis Leclerc, comte de Buffon, accueille du haut de son fauteuil de bronze les promeneurs venus profiter des allées fleuries de « son » Jardin des Plantes. Le Bourguignon peut ainsi apprécier jour après jour la grandeur et la popularité de son œuvre.
Personne n'aurait pu deviner que le jeune Buffon, élève moyen issu d'une famille devenue noble quelques années à peine auparavant, deviendrait un personnage majeur du royaume et de l'histoire des sciences. Il se lance d'abord dans les mathématiques avant de se consacrer à l'étude de la nature tout en se positionnant fort adroitement auprès de ses relations haut placées. C'est ainsi qu'à la mort subite de François du Fay, intendant du Jardin du Roi, il parvient en quelques jours à être nommé au poste désormais vacant. Commence ainsi, l'année de ses 31 ans, une aventure qui allait durer 50 ans. Il entreprend aussitôt de moderniser et développer l'institution créée sous Louis XIII pour former médecins et apothicaires : le Cabinet d'histoire naturelle explose rapidement sous les dons de richesses et curiosités naturelles venues des quatre coins du monde. Les meilleurs professeurs se succèdent dans les salles de cours et les locaux puis les jardins, après 1771, prennent des dimensions qui aujourd'hui encore peuvent surprendre les promeneurs des quais de Seine.
Devenu rapidement un personnage incontournable du monde scientifique, Buffon n'en reste pas moins à part. Les mondains le font fuir, les Encyclopédistes ne parviennent pas à lui faire rédiger un article pour leur grande oeuvre, les savants lui reprochent d'arborer en toutes circonstances air hautain et manchettes de dentelle aristocratique. Il paye aussi sa trop grande fidélité à sa terre natale où il passe les 2/3 de l'année, dès le printemps revenu, auprès de sa femme et de son fils, surnommé Buffonet (1764-1794, mort sur l'échafaud sans descendance). Ce précurseur ne pouvait s'arrêter là : le voici installant sur son toit le premier paratonnerre de France, s'efforçant de mettre le feu à distance à l'aide de miroirs ardents géants et s'amusant des facéties de sa petite guenon qui court avec son chapeau au milieu des pépinières, volières et ménagerie qu'il a fait construire sur son domaine.
"J'ai passé 50 ans à mon bureau" : c'est avec ces quelques mots que Buffon résume la genèse puis la rédaction des 36 volumes de son "Histoire naturelle", une des plus grandes aventures éditoriales de son temps. Création de la Terre, diversité de l'humanité, caractéristiques de chaque espèce animale...
C'est toute l'histoire et les spécificités de notre planète et de ses habitants qui sont présentées au public dans un style à la fois soigné, précis et accessible à tous.
Membre de l'Académie française, Buffon porte en effet beaucoup d'attention à l'écriture mais aussi à l'iconographie de ses ouvrages. L'Histoire naturelle comporte ainsi près de 2000 dessins passés pour beaucoup à la postérité, tout comme sont restées célèbres certaines de ses expressions telles que le Lion "roi des animaux" ou encore le Cheval "plus noble conquête de l'homme".
Par son style, sa rigueur et son ambition de développer et surtout vulgariser le savoir, Buffon a marqué son époque mais aussi les siècles suivants puisqu'il a ouvert la voie à plusieurs générations de grands spécialistes de l'histoire naturelle, devenue grâce à lui une science à part entière.
Seule la mort, à 81 ans, le 16 avril 1788 à Paris, put mettre fin à l'insatiable curiosité et la boulimie de travail de celui qui eut l'extrême honneur de voir, de son vivant, sa statue commandée par le roi lui-même.
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Carl von Linné figure parmi les Suédois les plus célèbres. Il naît le 23 Mai 1707 à Råshult en Suède, sous le règne de Charles XII, à une époque où son pays est encore une puissance redoutée. C'est un brillant représentant du siècle des Lumières comme son contemporain Buffon ou encore son cadet von Humboldt.
Aujourd'hui encore, l'oeuvre de Linné fait autorité, ne serait-ce qu'à travers les noms latins qu'il a donnés aux êtres vivants, faisant oeuvre de création, à la manière du Dieu de la Genèse.
On l'a surnommé le "Pline du Nord", en référence à un naturaliste romain ou encore le "second Adam" !
Le futur botaniste naît en Suède, sous le nom de Carl Linnaeus. Fier de son ascension sociale, il se plaira plus tard à rappeler ses modestes origines : "Un grand homme peut être issu d'une petite chaumière" ! Son père est un pasteur sans fortune, passionné de botanique et jardinage. Il transmet sa passion à son fils. Celui-ci effectue des études de sciences naturelles et de médecine à Uppsala. Ses notes d'étudiant révèlent un curieux mélange de superstitions populaires et de médecine moderne. Ainsi guérit-il sa soeur de la fièvre en l'enveloppant de la carcasse d'un mouton fraîchement abattu.
Son esprit critique se forme à la faveur d'un grand voyage au-delà du Cercle polaire en 1732 d'où il tire un recueil d'observations : Voyage en Laponie, qui le rend rapidement célèbre dans son pays. Mais ce sont ses travaux de naturaliste qui vont lui assurer une notoriété mondiale sous le nom de Carl von Linné, nom qui deviendra le sien après son anoblissement à l'âge de 55 ans. Pour compléter sa formation médicale, Linné part à l'étranger et publie à Amsterdam quelques travaux de botanique qui lui assurent un début de notoriété.
En 1738, il revient se fixer dans son pays natal. Professeur de botanique à l'université d'Uppsala, Carl von Linné a une conception fixiste de l'univers comme la plupart de ses contemporains : pour lui, tous les êtres vivants ont été créés une bonne fois pour toutes et ne sont pas susceptibles d'évoluer. Il suit en cela la vision d'Aristote, premier grand naturaliste connu (C'est un siècle plus tard seulement que Charles Darwin annihilera définitivement cette conception).
En attendant, Linné se heurte aux difficultés de classement des plantes et plus généralement des êtres vivants. Dans ses Species plantarum, en 1753, il commence par répartir tous les végétaux en 24 classes selon la disposition de leurs étamines. À l'intérieur de chaque classe, il établit des subdivisions (familles) caractérisées par la structure du pistil. Il ne va avoir de cesse d'affiner ensuite sa méthode, basée en premier lieu sur l'analyse des organes sexuels des plantes (en prenant soin de dissimuler la nature de ses travaux à sa femme Sarah, pudibonde comme toute luthérienne qui se respecte).
Cette classification qui rapproche des plantes n'ayant aucun rapport entre elles sinon le nombre d'étamines est totalement oubliée aujourd'hui car trop artificielle. Linné lui-même le reconnaîtra à la fin de sa vie...
Le Suédois aura plus de chance avec sa nomenclature binomiale, autrement dit l'état-civil qu'il invente pour identifier à coup sûr les plantes et les animaux. Cette nomenclature respecte une hiérarchie fondée sur le degré de complexité des plantes et plus largement des êtres vivants (plantes et animaux). De même que les hommes s'identifient à l'état-civil par leur nom de famille et leur prénom, il identifie les plantes par deux noms composés : le premier, avec une majuscule, indique le genre (par exemple Canis pour les chiens, loups, coyottes etc); le second désigne l'espèce (par exemple lupus, loup). Ces noms sont empruntés à la langue noble de son époque, parlée par toutes les personnes cultivées, du moins en Occident, le latin. Il s'ensuit qu'aujourd'hui encore, les naturalistes peuvent se comprendre quelle que soit leur culture d'origine !
Ainsi, il a posé les bases du système moderne de la nomenclature binominale. Considérant que la connaissance scientifique nécessite de nommer les choses, il a répertorié, nommé et classé, systématiquement, l'essentiel des espèces vivantes connues à son époque, en s'appuyant sur ses observations, ainsi que sur celles de son réseau de correspondants. La hiérarchie des classifications qu'il met en avant s'impose au XIX° siècle comme la nomenclature standard.
Père du concept de biodiversité par son identification de près de 6000 espèces végétales et 4 400 animales, sa classification s'inscrit dans un contexte historique plurimillénaire où la notion d'évolution des espèces n'existe pas encore, depuis la classification du philosophe grec Aristote, d'une part, et la doctrine biblique créationniste, d'autre part. Elle est donc fixiste et constitue le modèle dominant du rapport de proximité anatomique entre les espèces jusqu'au XIX° siècle.
La nomenclature binomiale de Linné, telle qu'elle a été exposée en 1758 dans son ouvrage majeur Systema naturae, forme la base de la taxinomie moderne (la taxinomie ou taxonomie est l'art de classer les choses).
Il décède le 10 Janvier 1778 à Uppsala, en Suède.
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Père de l'évolutionnisme
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Il y a plus de cent cinquante ans, le célèbre naturaliste révolutionnait l’histoire de la vie en mettant sur pied les théories de l’évolution et de la sélection naturelle. À l’heure où les créationnistes regagnent du terrain, retour sur ses travaux essentiels.
La théorie de l’évolution des espèces, échafaudée par le savant à la barbe blanche et sans cesse enrichie, complétée, complexifiée par des générations de chercheurs au prix d’un nombre incalculable de travaux sur le terrain et en laboratoire, paraît indétrônable. Ce que dit Darwin au milieu du XIXe siècle ? Que les organismes vivants sont en perpétuelle évolution, grâce notamment au phénomène de sélection naturelle qui fait qu’au sein d’une même espèce les individus les plus adaptés à leur milieu se reproduisent davantage que les autres. Et que toutes les espèces (l’homme n’est pas exclu de ce schéma) descendent d’un ou de plusieurs ancêtres communs. Un bouleversement dans la vision traditionnelle chrétienne qui prévaut alors, et pour laquelle les créatures en tout genre qui peuplent la planète sont des créations divines, immuables et indépendantes les unes des autres.
« La théorie de l’évolution au sens darwinien du terme est actuellement le meilleur cadre conceptuel que nous ayons à notre disposition pour comprendre rationnellement l’instabilité du vivant, pour penser un monde naturel essentiellement dynamique », commente Hervé Le Guyader, du laboratoire Évolution Paris Seine.
Les grands principes de l’évolution
En ce début de troisième millénaire, l’explication des mécanismes de l’évolution biologique formulée par Darwin et ses successeurs repose sur quatre principes fondamentaux. Premièrement : « Parmi les individus qui se reconnaissent comme partenaires sexuels potentiels, il existe des variations (physiques, génétiques, d’aptitude…). Quelle que soit la cause de cette variation, les espèces vivantes manifestent par conséquent une capacité naturelle à varier », explique Guillaume Lecointre, de l’Institut de Systématique, évolution, biodiversité.
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Deuxièmement, toute espèce se laisse sélectionner. Les horticulteurs qui créent, par exemple, de nouvelles variétés de roses en croisant entre elles d’anciennes variétés, et les éleveurs, qui ont fait du loup un teckel en 11 000 ans, le savent bien. « Le simple fait que les hommes puissent changer à leur guise la morphologie d’une espèce montre bien que celle-ci est en quelque sorte “plastique”, possède une capacité à être modifiée », dit Guillaume Lecointre.
Troisièmement, toutes les espèces se reproduisent aussi longtemps qu’elles trouvent des ressources alimentaires et des conditions optimales d’habitat. Leur taux de reproduction est alors tel qu’elles parviennent toujours aux limites de ces ressources ou trouvent d’autres limites, telles que la prédation qu’elles subissent de la part d’autres espèces. « Il existe ainsi une capacité naturelle de surpeuplement observable lorsque, par exemple, des espèces allogènes envahissent brutalement un milieu fermé comme une île », poursuit Guillaume Lecointre. Meilleur exemple : les lapins introduits au XIXe siècle en Australie s’y sont mis à pulluler, détruisant la végétation et les cultures. Pour autant, la planète n’est pas dominée par une unique espèce hégémonique, « mais bien au contraire peuplée de millions d’espèces en coexistence et cela malgré la capacité naturelle de surpeuplement de chacune d’entre elles. Ainsi, chaque espèce constitue une limite pour les autres soit en occupant leur espace, soit en les exploitant (prédation, parasitisme), soit en partageant les mêmes ressources. Bref, les autres espèces constituent autant de contraintes qui jouent un rôle d’agent sélectif ».
Quatrièmement, le succès de la croissance et de la reproduction des espèces dépend d’optima physiques (température, humidité, soleil…) et chimiques (pH, molécules odorantes, toxines…). « Ces éléments constituent eux aussi des facteurs contraignants, dit Guillaume Lecointre. S’ils changent, les variants avantagés ne seront plus les mêmes. »
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En définitive, de multiples facteurs, au sein de l’environnement physique, chimique et biologique dans lequel évolue une espèce, induisent une sélection naturelle à chaque génération, dont le résultat est un « succès reproductif différentiel ». Traduction : au sein d’une même espèce, les individus porteurs d’une variation héritable, momentanément avantageuse par les conditions du milieu, se reproduiront davantage. « Si ces conditions se maintiennent assez longtemps, ajoute Guillaume Lecointre, le variant avantagé finira par avoir une fréquence de 100 % dans la population. L’espèce aura alors changé. » Conclusion, aucune espèce n’est stable dans le temps.
Les prédécesseurs
S’il revient à Darwin d’avoir postulé deux grandes idées – la descendance avec modification et le rôle essentiel de la sélection naturelle dans l’adaptation des formes vivantes, donc dans l’évolution –, celles-ci ne lui sont pas venues tout à trac. Le terrain avait été débroussaillé, entre autres, par le zoologiste Jean-Baptiste de Monet, chevalier de Lamarck, et le géologue écossais Charles Lyell. C’est d’ailleurs lesté du premier volume des Principles of Geology, de Lyell, que le jeune Darwin quitte Plymouth fin 1831 pour effectuer un tour du monde à bord du navire Beagle. Un très long voyage d’exploration naturaliste au cours duquel Darwin pose le pied sur les îles Galapagos où s’ébattent des tortues terrestres, des iguanes, des otaries, des pinsons…
L’idée novatrice de Darwin, plus que la sélection naturelle, c’est la descendance avec modification, le fait que les espèces ont une histoire et sont apparentées.
Ces oiseaux, tout en présentant entre eux de frappantes ressemblances morphologiques, se distinguent par divers détails comme la forme et la taille de leur bec. Darwin comprend que l’isolement de ces volatiles sur des îles les a conduits, à partir d’une souche unique d’origine continentale, à présenter des variations liées probablement à des différences de mode de vie et d’habitudes alimentaires. Plus de vingt ans de labeur vont s’ensuivre avant que ne paraisse De l’origine des espèces. Deux décennies au cours desquelles Darwin « écrit à des correspondants du monde entier, les questionne, leur demande des statistiques, se renseigne sur la systématique des espèces qu’il observe et en tient compte pour ses interprétations. Comme s’il concevait déjà que le principe selon lequel les espèces dérivent d’ancêtres communs devait être utilisé pour étudier l’acquisition des adaptations, comme on le fait aujourd’hui », dit Michel Veuille, de l’Institut de Systématique, évolution, biodiversité.
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Alors que de nombreux exégètes de Darwin font de 1859 le temps zéro d’un événement scientifique hissant la biologie au rang de science historique, l’épistémologue André Pichot, du Laboratoire de philosophie et d’histoire des sciences-Archives Henri Poincaré, minimise l’importance de Darwin dans l’histoire des sciences. Selon lui, « le darwinisme de 1859 ne consiste guère qu’en la sélection naturelle. Or celle-ci n’était plus vraiment une nouveauté au milieu du XIXe siècle. On trouve par exemple ce concept en 1813 chez William Charles Wells puis, en 1831, chez Patrick Matthew, qui accusera Darwin de plagiat. On sait aussi qu’Alfred Russel Wallace en avait conçu une version comparable à celle de Darwin en même temps que celui-ci. Sans oublier le pasteur, géologue et politologue Joseph Townsend, dont Darwin a quasiment recopié les thèses en ce domaine ». En fait, poursuit André Pichot, l’idée de sélection était déjà plus ou moins dans l’air du temps. Et, si elle a fait le succès de Darwin, c’est que le moment était propice. « La seconde moitié du XIXe siècle a vu le triomphe du libéralisme économique, et Darwin a apporté à celui-ci un argument de poids en lui donnant un fondement naturel. »
Une interprétation qui fait bondir les aficionados du grand Charles. « L’idée novatrice de Darwin, plus que la sélection naturelle, c’est la descendance avec modification, le fait que les espèces ont une histoire et sont apparentées, intervient Hervé Le Guyader. La désormais célèbre réunion organisée en juin 1860 à Oxford par l’évêque Samuel Wilberforce porte d’ailleurs sur ce point. Wilberforce, apostrophant le darwinien Thomas Huxley, lui demande si c’est “par son grand-père ou par sa grand-mère qu’(il) descend du singe” et s’attire cette réponse non moins célèbre : mieux vaut un singe qu’un imbécile… »
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La génétique en renfort
Si la théorie de Darwin bouleverse la vision chrétienne traditionnelle du monde, elle souffre d’un lourd handicap : les causes et les lois de l’hérédité, ainsi que la véritable nature de son support matériel, sont encore inconnues. Tout en soutenant que la sélection naturelle est le mécanisme principal de l’évolution, il pense aussi que les caractères acquis au cours de l’existence peuvent se transmettre à la descendance. Pourtant, les contre-exemples sont faciles à trouver : ainsi, un mari devenu cul-de-jatte donne à sa femme des enfants dotés de deux jambes…
« La théorie darwinienne de la sélection naturelle connaît une “éclipse” à partir de la mort de Darwin en 1882, intervient Michel Veuille. Après la redécouverte des lois de Mendel sur la transmission héréditaire en 1900, une science nouvelle, la “génétique des populations”, va retrouver toute l’importance de la notion de “sélection naturelle”. Les modèles mathématiques proposés par Fisher, Haldane et Wright reçoivent la reconnaissance de la communauté scientifique en 1932. Ensuite seulement, des expérimentateurs feront de la génétique des populations naturelles une discipline “de terrain” ».
Les années 1940 à 1970, quant à elles, vont assister au mariage de la génétique des populations avec la zoologie, la botanique et la paléontologie, qui se regardaient jusqu’ici en chiens de faïence, et à la naissance de la « théorie synthétique de l’évolution ». Ses promoteurs, explique Guillaume Lecointre, « cherchent à décortiquer les mécanismes engendrant la biodiversité en partant des mécanismes décrits par la génétique des populations et en intégrant les savoirs des naturalistes sur les variations naturelles géographiques au sein des espèces et sur la spéciation».
(Extrait d'article publié dans CNRS Le journal, n° 227, décembre 2008.)
Le créationnisme, une dangereuse croisade contre Darwin « Je ne suis pas que le chevalier blanc qui pourfend le créationnisme, bien qu’il faille traiter ce sujet », dit Pascal Picq, paléoanthropologue Collège de France, un brin agacé d’avoir à commenter une nouvelle fois les méfaits de la croisade que mènent aux États-Unis les milieux fondamentalistes protestants contre la théorie de l’évolution. « Ces Églises, qui professent que l’Univers et la Terre ont été créés par un dieu il y a environ 6 000 ans, ne cessent de gagner du terrain et visent à rien de moins qu’à installer une théocratie, dit-il en retrouvant tout son punch. L’Europe n’est pas à l’abri. Le regain de créationnisme auquel on assiste aujourd’hui ne constitue ni plus ni moins qu’une menace pour la laïcité et la démocratie. » Autre courant de pensée qui a le don d’ulcérer les évolutionnistes : le « dessein intelligent », un « néocréationnisme » qui se présente comme une science et affirme que certains faits de l’évolution (par exemple la formation de dispositifs structuraux et fonctionnels complexes comme l’oeil) seraient à jamais inexplicables par la science, et qu’il faut donc rechercher des causes non naturelles à leur survenue. « Le dessein intelligent invoque l’existence d’une “intelligence supérieure” pour expliquer la fabuleuse diversité du vivant », dit Pascal Picq. Comment repousser les assauts du créationnisme et du dessein intelligent ? En réhabilitant en priorité les concepts fondateurs de la théorie de l’évolution dans les programmes scolaires. |