Milan noir ou Milan royal ?

par Pascale MD  -  13 Juin 2023, 07:10

 

En France, et plus généralement en Europe, on rencontre deux espèces de Milans :

Le Milan noir (Milvus migrans) et le Milan royal (Milvus milvus).

Pour les distinguer l'un de l'autre, il existe différents critères sur lesquels s'appuyer  :

La forme de la queue.

Une queue en forme de V permet de distinguer les Milans des autres rapaces. Cependant, la queue permet aussi de différencier les deux espèces.
- Milan royal : Il arbore une queue longue, claire et profondément échancrée.

 

Queue de Milan royal


- Milan noir : Il présente une queue plus courte, sombre, triangulaire et sans échancrure.

Queue de Milan noir


Cependant, selon notre angle de vision et de l'altitude de l'oiseau, l’échancrure  de la queue du Milan royal peut varier. Elle est peu visible lorsque l’oiseau a ses rectrices très écartées. De plus, la profondeur de l’échancrure du Milan royal est variable d’un individu à l’autre, et le Milan noir peut lui-même avoir une queue légèrement échancrée.

Dans ce cas cas, il vaut mieux se reporter à d’autres critères…

La couleur de la tête.
 
En général, le Milan noir a la tête sombre et le Milan royal a la tête pâle.
En réalité la tête du Milan royal est toujours pâle, mais chez le Milan noir, elle peut varier d’un individu à l’autre. Certains Milans noirs peuvent en effet avoir une tête aussi pâle que que celle d'un Milan royal. 

Si la tête est sombre, on peut donc se dire qu’on est forcément en présence d’un Milan noir, mais si elle est pâle alors il faut alors rechercher d’autres critères.

 

Milan royal

Ci-dessus Milan royal (et ici, avec les rectrices bien écartées, la queue n'est pas échancrée du tout mais elle est très claire !)
Ci-dessous Milan noir (la queue est plus sombre que celle du Milan royal)

Milan noir

Comme vous pouvez le constater sur ces deux photos, la couleur de la tête du Milan noir est à peine plus sombre que celle du Milan royal.

Les digitations.

Ce sont les plumes situées à l’extrémité des ailes et qui évoquent les doigts de la main :
Le Milan royal en possède 5 quand le Milan noir en possède 6.

Cependant, sur la photo ci dessous, l'oiseau en haut est un Milan royal et sur l'aile de gauche bien visible on compte 6 doigts quand on ne devrait en compter que 5, et sur le Milan noir en dessous, on ne compte que 5 doigts quand on devrait en compter 6 !

 

Milan royal au dessus et Milan noir en dessous


On aurait pu se dire que les digitations étaient le critère le plus discriminant, malheureusement pas forcément. Selon l’attitude de l’oiseau, les rémiges seront plus ou moins resserrées et peu visibles, ce qui ne facilitera pas le comptage dans la mesure ou :
- la dernière plume nettement plus petite n'est pas toujours visible ;
- L’oiseau peut avoir perdu une plume accidentellement ou lors de la mue (il n'est pas rare de voir des Milans avec des rémiges manquantes).

 

Milan royal sur la droite et Milan noir sur la gauche

Sur la photo du dessus, prise quelques millièmes de seconde après la précédente, on peut compter 6 doigts sur les deux oiseaux.

Par conséquent, ce n'est toujours pas un critère forcément fiable non plus, ces deux photos l'ont démontré.

L'envergure.

Le Milan noir a moins d'envergure que le Milan royal. 
- Milan noir : 135 à 155 cm
- Milan royal : 145 à 170 cm

En plus de son envergure, ce dernier à une silhouette plus élancée, des ailes plus longues par rapport à son corps.

C’est un critère qui peut être flagrant quand on voit les deux espèces voler ensemble, cependant, en revenant sur la photo précédente, par effet d'optique les oiseaux semblent être sur le même plan et c'est au Milan noir qu'on attribuerait la plus grande envergure.

Et de plus, les plus grands des Milans noirs peuvent atteindre la taille des plus petits des Milans royaux.

La couleur du plumage. 

Vu du dessus, le Milan noir a un plumage assez uni et sombre.
Le Milan royal est plus clair, la queue est rousse et l'ensemble est nettement plus contrasté.

 

Milan royal

Ci-dessus Milan royal (on compte bien les 5 doigts, mais la queue n'est pas du tout échancrée).
Ci-dessous Milan noir

Milans noirs


Pour le Milan royal, vu du dessous, les panneaux alaires (également appelés "fenêtres") sont nettement blancs, la queue est pâle sous le dessous. Les plumes des panneaux alaires et de la queue diffusent bien la lumière du soleil. 

Le Milan noir quant à lui peut avoir des panneaux alaires (ou ne pas en avoir) mais ceux-ci sont beaucoup plus ternes. La queue est gris-brun. Les plumes des panneaux alaires et de la queue sont plus opaques. 

 

Milan royal

Ci-dessus Milan Royal (cette fois la queue est échancrée et on compte bien 5 doigts).
Ci-dessous Milan noir (les rectrices sont resserrées, donc pas moyen d'identifier avec la queue).

Milan noir


La couleur est donc un excellent critère de différenciation des deux espèces mais elle n’est pas toujours exploitable selon la distance, la luminosité ou encore la qualité de la photo.

Le cri. 

- Le Milan noir émet des cris saccadés semblables à un ricanement.

Enregistrements des cris de Milans noirs ICI

- Le Milan royal pousse de longs cris doux ou stridents avec des tonalités montantes et descendantes.

Enregistrements des cris de Milans royaux ICI


La saison et la zone géographique.

Comme son nom scientifique l’indique, le Milan noir (Milvus migrans) et un oiseau migrateur. Il hiverne en Afrique et revient en Europe au printemps.

 

Retour des Milans noirs au Printemps

Retour des Milans noirs dans le Sud courant juin de chaque année.
On peut parfois être en présence de 200 à 300 individus certains en vol, d'autres posés, ce qui peut être très impressionnant.

Retour des Milans noirs au Printemps


Le Milan royal, quant à lui, est un migrateur partiel. Les individus du Nord de l’Europe migrent dans des régions plus chaudes et les individus du Sud de l'Europe résident à l’année. Entre ces deux zones, certains individus migrent d’autres non. Par conséquent si on aperçoit un Milan en hiver avec de la neige, il y a de fortes probabilités pour qu’il s’agisse d’un Milan royal ! Dans le Gard et dans l'Hérault, les Milans royaux sont présents toute l'année.

Histoire de nous embrouiller un peu plus...

Il faut noter que le Milan royal et le Milan noir peuvent occasionnellement s’hybrider, donnant ainsi naissance à des individus Milvus milvus × Milvus migrans possèdant un mélange de caractéristiques des deux espèces.
Ceci reste un phénomène rare, mais il existe.

Pour tenter de conclure.

Petit récapitulatif 

Milan noir ou Milan royal ?


Il existe donc de nombreux critères permettant de différencier le Milan noir du Milan royal mais il y a aussi de nombreuses raisons de se rater sur l'identification. Quand on est loin ; Quand la luminosité n’est pas très bonne ; Quand la photo est à contre-jour ou est peu détaillée... il est alors préférable de croiser plusieurs critères afin d’éviter les confusions ou encore de se limiter à... Milan ;-) 
 

Et maintenant...
Saurez-vous déjouer les pièges et identifier les oiseaux des 8 photos ci dessous ?
A vous de jouer !
Réponses samedi. sous les photos.


1 - Milan royal
Tête et ensemble clair, épaules et ventre roux, queue est claire et l'ensemble est nettement contrasté.
Panneau alaire bien visible sur l'aile à droite et bien marquée.


2 - Milan Noir
L'ensemble est nettement plus sombre et terne.
Panneaux alaires quasi inexistants et queue sombre.


3 - Milan royal
Tête et ensemble clair, épaules et ventre roux, queue claire et l'ensemble est nettement contrasté.
Panneaux alaires blancs et bien marquées.


4 - Milan noir
Plus terne et nettement moins contrasté que le royal.
Panneaux alaires quasi inexistants et queue sombre.


5 - Milan noir
Plus terne et nettement moins contrasté que le royal.
Panneaux alaires quasi inexistants et queue sombre.


6 - Milan royal
Tête et ensemble clair, ventre bien roux, panneaux alaires blancs et bien marquées, queue claire.


7 - Milan royal
La tête est très claire et les plumes visibles sur le ventre sont nettement rousses.


8 - Milan noir
Ici, c'était plus compliqué car cet oiseau fait partie des Milans noirs à la tête très claire,
Il s'agit d'un adulte protégé en volière au Parc Ornithologique du Pont de Gau après être passé à l'hôpital du parc. Il a été blessé et ne peut retrouver la liberté ayant un handicap trop important.


Comme vous avez pu le constater, la digitation n'est vraiment pas un critère d'identification à retenir contrairement à ce que différents sites préconisent, le Milan royal laissant la plupart du temps apparaître 6 doigts lui aussi.

Comme sur la dernière photo, la tête d'un Milan noir peut très claire aussi et cela peut être trompeur comme unique critère.

Les meilleurs critères pour les identifier sont donc pour le Milan royal le plumage plus clair et contrasté avec des panneaux alaires blancs et bien marqués, une queue claire, et si avec ces éléments la tête est aussi très claire, il n'y a aucun risque d'erreur avec un Milan noir dont l'ensemble est plus sombre et sans réel contraste.

Merci à ceux qui ont participé ;-)



Compléments d'informations quant à la répartition de ces deux oiseaux (Sources LPO) : 

Milan noir : En France, il est absent en tant que nicheur dans le Nord-Ouest, dans quelques régions circum-méditerranéennes et alpines et de la Corse. On le rencontre également en période de migration dans la plupart des régions, le couloir rhodanien étant un axe de passage important. Les derniers migrateurs sont observés en octobre. Le transit des migrateurs européens est très important sur notre territoire et concerne les oiseaux originaires de France, mais aussi la plupart de ceux nichant en Suisse et en Allemagne. Les cols pyrénéens voient ainsi passer chaque année plusieurs dizaines de milliers d’individus. L’hivernage en France de ce migrateur trans-saharien est anecdotique, bien qu’apparemment devenu régulier depuis une trentaine d’années. Quelques individus sont maintenant vus de façon régulière en France au sein de dortoirs de Milans royaux.

En Cévennes ICI

Milan royal : En France, l’aire de répartition du Milan royal en période de reproduction forme une diagonale allant du sud-ouest au nord-est. Les effectifs se répartissent comme suit : 15% dans les Pyrénées, 40% dans le Massif central, 20% dans le Jura, 15% dans les zones collinéennes du nord-est de la France (Alsace, Champagne-Ardenne, Lorraine et Bourgogne) et 10% en Corse. La France héberge 16% de la population mondiale. L’hivernage en France concerne essentiellement le piémont Pyrénéen (près de 4 000 individus) et le Massif central (1 500 individus) auxquels s’ajoutent quelques dortoirs inférieurs à 20 individus dans le nord-est de la France, un dortoir d’une centaine d’individus sur la décharge d’Entressen dans les Bouches-du-Rhône et la population Corse sédentaire.

En Cévennes ICI



 

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A
Bonjour Pascale,<br />  Une bonne explication pour les spécialistes des oiseaux et notamment les milans. Pour ma part, j'admire les photos toujours très intéressantes à regarder. Merci.<br />  Bises
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P
Bonjour Pascale. Question subsidiaire : y-a-t'il des milans à Milan ? Noirs ou Royaux ? J'aime beaucoup tes photos en vol !
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M
quel beaux oiseaux je ne saurai te dire qui est quoi. mais ma photo préférée est la dernière, ce petit oiseau a l'air coquin est trés beau. passez un bon Week end bisous bisous
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P
Bonjour Pascale, ton article est vraiment très complet sur ces deux espèces de Milans : nous avons maintenant tous les critères permettant de distinguer les oiseaux, merci. Ta série de photos, variant les cadrages et les attitudes, est des plus réussies, bravo. Pour ce qui est de la météo, c'est surprenant et agréable d'avoir dans le nord plus de journées très ensoleillées que de pluie habituelle : tout est sec et brûlé par endroit mais la luminosité qui nous manquait est à oublier. Chacun profite comme il peut pour vaguer à ses occupations avant que la pluie et les orages ne remontent ce dimanche  à bientôt, bisous.
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P
Bonsoir, <br /> Un article très intéressant qui démontre superbement la difficulté de la distinction et qui aussi incite à mieux observer .<br /> Au-delà de cela , le petit exercice final permet au lecteur  de vérifier sa faculté de concentration et sa rapidité d'assimilation !<br /> Bonne fin de semaine !
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A
Rien à voir avec ton article sur ces deux rapaces, mais je constate que tu en connais un rayon dans le domaine de la connaissance des animaux volants: ce que tu nous dis au sujet de l'abeille solitaire dans l'article d'Élisabeth m'a surprise et enchantée. Bonne journée, Gisèle
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C
bonjour Pascale<br /> tellement belles tes photos que j'ai appelé mon mari pour qu'il vienne les voir. J'ai essayé de trouver, une erreur je trouve que c'est bien car je ne savais pas les différencier, j'espère m'en rappeler<br /> bon weekend
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S
superbe article beau et très instructif... tout bien quoi... gros bisous 
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R
DUe to my blurry vision I cannot attempt to distinguish the birds.  I do enjoy seeing the close ups of the feathers and eyes.  Friendship
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M
Bonjour Pascale , <br /> Je me suis régalé et bien instruit à lire ton post ; passionnant !<br /> Dans nos Pyrénées d'après ce que j'ai vu , il me semble que c'est le Milan Royal qui est prédominant . Mais ils sont rares , on voit plus de vautours , aigles et même gipaètes .<br /> Et bravo pour tes photos , toujours au top !
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