Salut des ailes, révérences... une période à ne pas rater !
Flamant rose
Phoenicopterus roseus - Greater Flamingo
(Pallas, 1811)
De Début décembre à environ mi-février, c'est la saison de la parade nuptiale des Flamants Roses en Camargue. Matures à l’âge de 4 ans, ils peuvent vivre 40 ans et former chaque année un couple différent.
Tête à tête, bec à bec, ils tournoient dans une chorégraphie admirablement réglée. C'est un moment qui est très important pour eux qu'il ne leur faut surtout pas rater.
La chorégraphiée de cette parade nuptiale se fait dans une sorte de danse, où les couleurs chatoyantes ont une part prédominante dans le choix du partenaire. Ils ont des mouvements très décomposés, assez saccadés et se répétant inlassablement... C'est ainsi qu'ils vont se choisir l'un l'autre.
Ils n'ont pas de temps à perdre, et pour espérer former leur couple, il faut être le meilleur danseur. Ils doivent comme s'hypnotiser mutuellement dans une danse sensuelle. Chaque Flamant essaie de se montrer le plus séduisant et le plus beau possible.
L'une des attitudes caractéristiques des flamants en parade est la coordination de leurs mouvements de tête qui se tournent vivement à gauche puis à droite dans un bel ensemble régulier. Mâles et femelles se déplacent en cadence en effectuant notamment le salut des ailes : ils se dressent, tête vers le ciel, poussant un cri rauque, puis, ils déploient soudainement leurs ailes entièrement pendant un bref laps de temps d'une ou deux secondes comme sur la photo ci-dessus ou trois oiseaux sont ailes ouvertes.
On observe aussi les courbettes ou révérences (comme sur les photos suivantes), le lissage des plumes du dessous des ailes, ou du dos, avec le bec. Dans la formation du couple, être bon danseur sera le gage d'être un bon reproducteur.
Des chercheurs de la Tour du Valat ont relevé 136 combinaisons de posture. Et plus la danse est bien menée, plus les chances sont grandes de trouver un partenaire pour la reproduction. Ce moment exceptionnel où les couples se forment peut s'observer pendant plusieurs semaines.
Un autre des critères de beauté est d'avoir le plumage le plus rose possible, signe qu'ils sont en bonne santé.
Il y à donc la danse, mais aussi les couleurs qui leur permettent de bien réussir leur parade sans laquelle ils ne pourraient se reproduire. Si par carence en bêta-carotène (fournie par leur nourriture (la crevette Artemia salina, crustacé vivant dans les lacs salés, les lagunes et les marais salants) ils restent blancs, ils ne s'accouplent pas et disparaissent sans descendance.
Une fois qu'ils se sont choisis, ils restent fidèle pendant l'année. Contrairement à d'autres espèces, ce n'est pas seulement le mâle qui parade pour séduire sa belle. Les deux sexes se prêtent à ce "concours de danse".
Les accouplements débutent généralement fin mars, mais selon les températures, il arrive qu'ils commencent plus tôt.
L'organisation est parfaite : un couple par an, un poussin par an.
Cette période de reproduction s'achèvera début août avec l'envol des premiers poussins.
Désolée pour les photos suivantes, mais ils n'ont pas daigné se mettre de face ;-(
Pour se reproduire, les flamants ont besoin d'un îlot entouré d'une eau suffisamment profonde pour décourager les prédateurs terrestres comme le renard ou le sanglier.
Depuis 2014, pour nidifier, les flamants roses se sont installés dans le Gard. Ils ont quitté l'étang de Fangassier à Salin-de-Giraud dans les Bouches-du-Rhône pour installer leurs nids à Aigues-Mortes. S'ils sont partis de l'étang de Fangassier, c'est qu'ils n'ont pas eu le choix. L'arrêt des pompes alimentant l'étang est la conséquence de la vente en 2008 par les Salins du Midi de 2.000 hectares de terres, dont l'étang du Fangassier, au Conservatoire du littoral PACA qui a souhaité "remettre le site en naturalité" (précision apportée par les Salins du Midi).
Ainsi privés de leur nourriture (les crevettes qui ne vivent que dans l'eau saturée en sel), ils ont cherché un autre site de reproduction et l'ont trouvé aux Salins d’Aigues-Mortes.
Le flamant est un animal grégaire. Si l'un d'eux s’envole, de nombreux autres autour de celui qui donne le départ le suivent. De plus, ils nidifient en colonie, tous au même endroit. Quand les premiers Flamants sont arrivés sur le nouveau site, tous les autres ont suivi.
Il y avait plusieurs années que les Salins d’Aigues-Mortes espéraient, et s'étaient préparés à attirer les Flamants. Les saliniers ont pour cela créé des îlots de nidification et y ont même installé de faux Flamants, histoire de mettre les vrais en confiance.
L’îlot de l’étang du Fangassier est d’ailleurs lui-même dû à la main de l’homme car la nature a depuis longtemps cessé d’en créer faute de dépôts de sédiments, le Rhône ayant été endigué.
Les saliniers d’Aigues-Mortes ont aussi posé des cages pour capturer les Renards (lesquels, je vous rassure, sont relâchés beaucoup, beaucoup plus loin).
Dès l'arrivée des premiers Flamants sur le site, leurs parades amoureuses ont annoncé qu’ils venaient pour nidifier. Pour les protéger, les saliniers ont créé un vaste no man’s land autour de la zone. Personne n’a le droit de s’en approcher, pas même eux !
A la très belle surprise de la venue des Flamants que les Saliniers espéraient, une autre s'est ajoutée : ils ont choisi de nidifier là où les saliniers ne les attendaient pas, faisant fi des jolis îlots qui à la base étaient censés les séduire. La zone de nidification qu’ils ont choisie n’est autre qu’une modeste piste qui passe au milieu d’un marais, une presqu’île plus qu’un îlot, d’où l’utilité renforcée des cages à renard.
Tout se passe bien sur le site des Salins d'Aigues-Mortes, sauf en juin 2018... lors du tournage du film de Nicolas Vanier "Donne-moi des ailes", quant les oiseaux ont été effrayés par un ULM les survolant en pleine période de couvaison. Les Flamants roses ont fui leur habitat laissant à l'abandon 500 œufs qui ont tous été perdus.
Le survol à basse altitude avait créé une panique chez les oiseaux, et un nid sur dix avait été abandonné. Cinq cent couples sur les 4500 que comprenait la colonie ont abandonné définitivement leur œuf. La reproduction de ce bel oiseau reste en effet fragile (surtout quand l'humain est proche) car il ne supporte pas le moindre dérangement. Aussi il peut abandonner son nid à la moindre inquiétude.
Ironie de l'histoire, le film en question est fondé sur le sujet de "la protection des oiseaux" selon le cinéaste, film parlant d'un scientifique passionné par les oies sauvages et de son fils. Ce film est inspiré de l'histoire vraie de Christian Moullec, un ornithologue qui, en 1995, a sauvé des oies en les aidant à changer de voie migratoire.
"La présence de cette espèce emblématique (...) exigeait les plus grandes précautions", a précisé l'association France Nature Environnement qui a porté plainte contre X pour perturbation intentionnelle et destruction d'œuf d'espèce protégée.
Article détaillé du 05/08/2022 de Reporterre : ICI
Photos des parades décembre.
Photos accouplement fin février.